Assedic et portage salarial : la situation
La relation conflictuelle entre le Pôle Emploi et les cadres en portage salarial a fini par aboutir à un accord, définitif avec l’ordonnance du 2 avril 2015, qui reconnait au salarié d’une société de portage le droit à des ARE entre deux missions.
Après une mission de portage salarial, le salarié porté bénéficiera-t-il d’allocations chômage (ARE) versées par l’Unédic (et par l’intermédiaire du Pôle Emploi) ?
1er cas : s’il perçoit des ARE avant de travailler en portage salarial, il retrouvera ses droits à la fin de son contrat de portage. Ses droits auront donc simplement été suspendus, comme lors de la reprise de n’importe quel autre emploi salarié.
2ème cas : s’il ne perçoit pas d’ARE avant de signer avec une société de portage salarial, alors les choses se compliquent. En effet, d’avoir cotiser au chômage en tant que salarié d’une société de portage ne lui donnera pas toujours droit à des allocations.
Portage salarial et Assedic : le constat
Des indemnités chômage quand on n’a plus de travail, est-ce compatible avec le portage salarial. En effet, si un salarié acquiert des droits aux ASSEDIC durant son contrat de travail, le chef d’entreprise (auto-entrepreneur, entrepreneur individuel, gérant majoritaire d’EURL ou SARL...) ne peut prétendre aux ASSEDIC en cas d’échec de son projet.
Or le salarié porté se trouve dans un certain vide juridique : en effet, s’il bénéficie d’un contrat de travail, perçoit un salaire et des fiches de paye, cotise aux ASSEDIC (6,40% de cotisations salariales), d’un autre côté il se comporte comme un indépendant.
Dans "portage salarial", il y a "salarial" : cela signifie que le contrat signé avec la société de portage sera un contrat de travail qui vous rendra salarié de cette société de portage. En revanche, pour les ASSEDIC, vous restez un indépendant qui exerce son activité en free-lance.
Aussi, certaines Assedic (en Ile de France notamment) contestent l’existence d’un lien de subordination entre la société de portage salarial et ses salariés portés. Ce lien de subordination étant une condition essentielle du contrat de travail, ces Assedic contestent le statut de salarié aux salariés portés par une société de portage salarial.
Après certains salariés portés se retrouvent ainsi devant une situation paradoxale : durant leurs missions en portage salarial, ils ont cotisé aux Assedic mais ne peuvent bénéficier des allocations chômage en fin de contrat.
Portage salarial et Assedic : dans la pratique
Lors de son inscriptions aux Assedic, faut-il préciser que son dernier emploi relevait du portage salarial ?
Tout d’abord, il faut rappeler qu’en fin de contrat, une société de portage salarial délivre à son salarié porté les documents obligatoires et nécessaires à une inscription aux Assedic. Aussi, suite à une mission en portage salarial, le demandeur d’emploi possède :
– un contrat de travail (non nécessaire aux Assedic, mais qui peut être apporté en cas de doute ; mais attention, ne pas confondre le contrat de travail qui ne fait pas mention du portage salarial de la convention de portage salarial qui ne sert qu’à régir les relations entre sociétés de portage salarial et salariés portés)
– des bulletins de paye,
– une attestation employeur indiquant les rémunérations et cotisations versées par l’employeur à son salarié durant les 12 derniers mois.
Or sur aucun de ces documents n’apparaît la mention "portage salarial". Aussi, sans mentir aux Assedic, leur fournir les documents demandés ne vous oblige nullement à faire référence au portage salarial.
En revanche, la société de portage salarial a aujourd’hui l’obligation d’établir une attestation spécifique pour ses salariés et à destination du Pôle Emploi. Aussi, il semble aujourd’hui illusoire de pourvoir cacher la nature exacte de son activité antérieure lors de son inscription au Pôle Emploi
Et d’ailleurs, comment le Pôle Emploi peut-il identifier une société de portage salarial ?
Le code APE de l’employeur permet d’identifier son secteur d’activité. Or si toutes les entreprises possédant le code APE 741G des sociétés de conseil ne sont pas des sociétés de portage salarial, toutes les sociétés de portage salarial relèvent de ce code APE.
Ensuite, par expérience, par une simple recherche sur internet ou à partir de listings internes, les Assedic peuvent facilement conclure que votre ancien employeur était une société de portage salarial.
Droits à des ARE pour certains salariés portés
Depuis novembre 2011, l’Unédic reconnaît le droit de percevoir des ARE suite à une mission de portage salarial. Mais ce droit est limité aux salariés de certaines sociétés de portage salarial et à certains salariés portés seulement. Des missions de service à la personne réalisées en portage salarial ne permettent pas de percevoir d’allocations chômage. A l’inverse, le consultant qui perçoit une rémunération importante et travaille avec une société de portage reconnue peut percevoir des ARE au terme de sa mission.
Cette reconnaissance du statut de salarié à des salariés portés est basée sur un accord tout d’abord jugé illégal par l’IGAS, mais qui a finalement fait l’objet d’un décret publié au journal officiel le 8 juin 2013.
En conséquence, le Pôle Emploi, face à un salarié porté, vérifie que sa mission entrait dans le champ d’application de ce décret en demandant au demandeur d’emploi de faire compléter par son ancien employeur une déclaration notifiant en particulier sa rémunération mensuelle. Sur cette base, le droit à des allocations chômage de ce chercheur d’emploi sera reconnu ou non.
Décret 8 juin 2013
Définitivement, le décret du 8 juin 2013 permet à la loi de clarifier le statut de portage salarial. En effet, ce décret confirme l’accord initialement négocié par le PRISME en 2010. Ainsi, seuls les cadres peuvent accéder au portage salarial, mais cette organisation du travail est désormais reconnue par la loi. Ainsi, la pratique du Pôle Emploi se trouve confirmée par la loi : les droits à des ARE ne pourront être accordés qu’aux salariés portés qui se soumettent à la loi (et donc aux cadres percevant plus de 2.900 euros par mois).
Rejet par le Conseil d’Etat
En avril 2014, le Conseil d’Etat a retoqué l’accord de 2010 et le décret de 2013, mais sans que cette annulation soit rétroactive, limitant simplement jusqu’au 1er janvier 2015 les mesures adoptées.
Ordonnance 2 avril 2015
Finalement, c’est l’ordonnance du 2 avril 2015 qui permet au portage d’accéder à une nouvelle définition en reconnaissant clairement :
– la relation tripartite qu’impose le portage salarial,
– l’absence de rémunération à verser par la société de portage salarial à son salarié porté une fois terminé sa mission (et malgré le contrat de travail qui les liait durant cette mission),
– à l’inverse, la possibilité pour le salarié porté de percevoir des allocations chômage entre deux contrats.
Le salaire mensuel minimum imposé aux cadres travaillant en portage salarial est fixé à 2.400 euros. Pour plus de détails sur cette ordonnance, se reporter à notre article principal.
Certaines Assedic refusent de verser des allocations chômage aux salariés portés au terme de leur contrat avec une société de portage salarial.
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Messages
1. Assedic et portage salarial : la situation, 11 septembre 2009, 10:51
Bonjour,
Du 15/09/2009 au 31/03/2009, j’étais salariée dans une société de portage salarial à temps complet.
L’activité diminuant, je suis obligée de passée à temps partiel à 20h/semaine, par le biais d’une autre société de portage mais pour le même employeur.
Je m’inscrit alors comme demandeur d’emploi pour pouvoir bénéficier des indemnités chômage auxquelles j’ai droit et me permettre de chercher plus sereinement un complément de salaire auprès d’un autre employeur.
Pour se faire j’ai fournit à l’antenne Pole emploi de Paris 19 les documents nécessaires à savoir, copie de mon CDD - mon certificat de travail, copie de mes bulletins de paye et l’attestation assedic et solde de tout compte.
Malgré cela on me répond que ce travail de 6,5 mois ne peut pas être pris en compte et que je ne corresponds pas aux critères ni à la définition du porté salarié inscrite dans le code du travail.
Pouvez-vous me dire vers qui me diriger pour me permettre de défendre mes droits face à une administration qui s’est déjà fait condamnée plusieurs fois par la justice administrative pour la non respect de la loi sur prise en compte d’activité de portage salariale comme une activité salariée ouvrant droit à des indemnités journalières de chômage ?
Dans un complète impasse, je vous remercie d’avance pour votre réponse.
Bien respectueusement
CG
1. Assedic et portage salarial : la situation, 21 septembre 2009, 15:16
Bonjour,
Je viens de prendre connaissance de votre message...
J’ai pour ma part travaillé plusieurs années en portage salarial.
Ma demande d’allocation auprès des ASSEDIC a été négative...et ce malgré plusieurs lettres de contestation...
Ils ne veulent rien entendre...et prétendent que le portage ne donne pas droit aux ASSEDIC...
Vous pouvez intenter une action au tribunal (certains l’ont fait, et avec succès...mais c’est long je crois) ou demander comme moi le remboursement des cotisations versées (et là les ASSEDIC sont obligés de le faire)
Il ya effectivement une incohérence totale à ce niveau là, il y aurait de quoi écrire au ministre concerné.
Quand ils prétendent que Pöle emploi fait des efforts pour être à l’écoute des gens...
2. Assedic et portage salarial : témoignages, 23 septembre 2009, 16:47, par Aide creation entreprise
Merci de vos témoignages. Je ne vois malheureusement pas qui pourrait vous aider actuellement ? La situation est parfaitement connue et n’évoluera que par la loi ou une décision de justice qui ferait jurisprudence. Dans l’attente, c’est au cas par cas. Aujourd’hui, le statut d’auto-entrepreneur concurrence le portage salarial : il ne donne pas non plus droit aux allocations chômage mais à au moins l’avantage de ne pas entraîner de cotisations à l’Unédic.